TEXTES - Sophie

 

 

Souvenirs de Sophie

II

L'école

 

 

 

Par Fred Pody.

 

 

VII

Cours de maintient

 

Aujourd'hui, nous allons avoir notre premier cours de maintien. Je suis curieuse de découvrir ce premier cours. Un peu inquiète également, les cours de cette école, ne sont pas facile. Ce qui ne m'empêche pas d'être pressée de découvrir ce cours et son professeur.

Nous attendions toutes devant la porte de la classe, qui était fermée, quand je vis Caroline s'approcher.

- Bonjour Mesdemoiselles! Je suis votre professeur de maintien, ainsi que la directrice des ateliers de couture. Ce cours est divisé en deux volets, cours de maintien, que je vous donnerais et cours de danse, donné par Mademoiselle Polaire.

- Polaire, quel nom bizarre! Dit Coralie

- C'est son nom de scène, elle ne vient que deux jours par semaine au château. Mais elle a une grande expérience professionnelle de la danse.

Et Caroline se retourna en disant.

- Suivez-moi, mesdemoiselles! Le cours se déroule dans la salle Sylphide.

Caroline nous fit entrer dans cette salle qui était immense, avec un grand miroir, couvant un mur.

La salle était pratiquement vide, sauf quelques bancs le long du mur, face au grand miroir et quelques accessoires que je ne reconnus pas dans un coin.

- Mesdemoiselles! Placez-vous devant le miroir, les deux premiers groupes devant sur une ligne, les deux autres derrière, également sur une ligne. Espacez-vous, chacun doit se voir dans le miroir.

Ont se plaça sur deux lignes, les groupes restant bien ensemble.

- Un peu de silence! S'il vous plait! Reculer! Reculer vous encore!

- Bien le premier rang, vous avancez vers le miroir avec élégances!

Et les deux premiers groupes s'avançaient.

- Bien, le deuxième rang! Avancez!

Caroline, nous observait une à une, et prenait des notes sur un petit calepin.

- Je pense que vous avez beaucoup à faire, pour acquérir une attitude distinguée et élégante. Première chose, vous vous déplacez beaucoup trop vite et avec de grandes enjambées. Une dame se déplace à petit pas, elle glisse sur le sol et ne se secoue pas comme un prunier, ni ne sautille partout. Vous devez rester parfaitement droite, votre corset devrait vous positionner correctement, mais vous devez également garder la tête haute, le regard haut. Vous allez faire un exercice de marche toutes ensembles.

Et Caroline se plaça au centre de la salle.

- Mesdemoiselles, formez un cercle autour de moi. Plus grand le cercle, ne vous collez pas, laisser de l'espace entre vous! Parfait, vous reprenez la marche autour de moi!

- Plus lentement!

- Sylvie, des pas plus petit!

- Estelle, ne confondez pas droiture et raideur. Seul votre buste doit rester parfaitement rigide, mais votre marche doit être plus souple.

- Prenez exemple sur Betty. Sa démarche est souple. Mais gardez la tête droite, le menton plus relevé!

On frappa à la porte et deux jeunes dames entrèrent. La première, en poussant un chariot. Elle portait une robe claire, très étroite, une ceinture verte, coiffée d'un chignon bas sur la nuque. La deuxième, avançait très lentement, Elle portait une robe claire, comme la première, et une ceinture verte également, mais sa robe était entravée par un ruban vert au niveau de ces genoux. Plus bas, sa robe s'évasait dans de multiples volants, qui s'agitaient et tourbillonnaient, quand elle marchait, avec un bruissement délicieux. Bien qu'elle avançait à pas minuscule, le tissu de sa robe se tendait à l'extrême sur ses cuisses, les dessinant à chaque pas. C'était un prodige d'équilibre que de se déplacer avec une robe aussi étroite, aussi entravée. Sa silhouette était vraiment attirante, étranglée aux genoux comme à la taille. Sa coiffure la signalait comme un feu la nuit. Elle était rousse, un roux flamboyant, et son chignon, bien que très serré, contenait difficilement une chevelure que l'on soupçonnait particulièrement volumineuse.

Caroline interrompit l'exercice et dit.

- Premier groupe, installez-vous sur les bancs, mesdemoiselles Véronique et son aide, vont vous chausser. Mesdemoiselles! Vous porterez toutes des chaussures à hauts talons. Au vus de votre très médiocre façon de marcher, nous commencerons par des talons de dix centimètres et pas trop fin. Attention! A partir de cet instant, il vous est interdit de marchez avec des talons moins hauts. Vous allez continuer de vous exercer durant ce changement de chaussures.

Et on repris la marche. Je me sentais très à laisse avec la hauteur des talons que nous devrions porter, d'autant que je portais déjà des chaussures à haut talons de dix cm, et que je m'étais déjà exercée avec des talons de onze cm. C'était avant mon entrée dans l'école. Le premier groupe était chaussé et reprenait place dans la ronde. Coralie et Sandrine se déplaçaient normalement, Lydia me semblait un peu raide, mais Estelle, avait manifestement des difficultés. Elle se tenait penchée en avant, les jambes fléchies. Je reconnaissais les effets des hauts talons quand on n'y est pas habituée. Sa démarche était encore plus raide qu'auparavant. Le deuxième groupe revint, elles aussi équipée de leurs nouvelles chaussures à hauts talons.

Alice en tête, très à laisse sur ces hauts talons, suivit de Betty, Christelle et Claudia. C'était étonnant, elles avaient clairement l'habitude des hauts talons, et elles le faisaient savoir, avec notamment un sourire narquois de Cristelle vis à vis de Estelle. Le groupe se fit rappeler à l'ordre par Caroline.

- Ce n'est pas parce que vous avez l'habitude des hauts talons, que vous devez vous permettre de vous déplacer comme des coureurs de cent mètres! Je vous prie d'avoir une attitude plus réservée, et de vous déplacer à petit pas. Mesdemoiselles! Quelle que soit votre habitude des hauts talons, cela ne suffit pas! Votre démarche doit être délicate et gracieuse. Ce deuxième groupe n'est certainement pas l'exemple à suivre. Quant à acquérir l'habitude des hauts et très hauts talons, ce n'est qu'une question de temps. Dans un an, vous marcherez toutes avec ces très hauts talons, et avec élégance.

Caroline m'étonnait. Je ne la connaissais pas aussi autoritaire. Le troisième groupe revint plus lentement. C'est Evelyne et Isabelle, qui avaient des difficultés d'équilibres, une démarche hésitante, à l'équilibre très instable.

C'était maintenant, notre tour de chausser ces bottines à haut talons. Véronique, releva mes jupes, et les rabaissa aussitôt avec un sourire.

- Mademoiselle porte déjà les chaussures réglementaires de l'école. Vous ne devriez pas avoir de difficulté pour marcher avec élégance. J'ai remarqué que vous vous déplaciez déjà avec de tout petit pas. Vous avez sûrement déjà fait des exercices de marche?

- Oui, avec Mademoiselle Caroline, je suis la nièce de Madame Florence.

- Ho! Je vois...

Solange faisait un peu la grimace, elle avait l'habitude des talons, mais six centimètres seulement. Quant à Gwendoline, c'était une découverte. Quand elle se releva, elle me dit.

- Sophie, mes chevilles sont tendues, mais c'est superbe, je me sens grandie, un sentiment de voir avec de la hauteur, c'est grisant!

- J'aime aussi me sentir grandie, ces talons nous obligent d'avoir une posture plus tendue, plus élancée et majestueuse. Ils nous obligent également, à une marche particulière, mais assez difficile, quand ont n'y est pas habituée. Fait attention aux premiers pas!

- Ho! Sophie! Aide-moi!

Gwendoline venait d'expérimenter l'équilibre instable des hauts talons. Je la tenais par la taille, pour ces premiers pas en hauts talons, des pas très instables, manquant se tordre les chevilles. Elle avançait prudemment, les jambes trop fléchies, trop penchée en avant.

- Redresse-toi ma chérie, cela va tirer sur tes chevilles, mais ce n'est qu'en te redressant que tu garderas ton équilibre.

Ces pieds tremblaient sur ces talons. Ces pas étaient mal assurés. Gwendoline se rendait compte que le plaisir d'une belle silhouette et de se grandir avait un prix. Solange se débrouillait mieux, mais je ne la sentais pas très à laisse sur des talons plus hauts.

Caroline fit reprendre les exercices de marche.

- Mesdemoiselles, vous allez défiler deux par deux, en vous tenant le bras. Faite en sorte, que celles qui sont le plus expérimentées, accompagne celles qui ont le plus de difficultés avec leurs talons.

Je pris le bras de Gwendoline, Solange était seule devant nous. Ont repris la marche des petits pas.

- Faite de tout petits pas! Essayer de garder vos genoux l'un contre l'autre!

Caroline nous faisait faire régulièrement des poses, et demandait à Véronique et son aide de masser les pieds de celle qui avait le plus de difficultés.

La cloche sonna, signalant la fin de ce cours de maintien.

- Mesdemoiselles. Avant de descendre déjeuner, je vous rappelle l'obligation d'ajuster le laçage de vos corsets pour l'après midi!

J'avais oublié, ce matin, Ninon m'avait lacée à 48cm, l'après midi, suivant ce que Delphine avait inscrit sur mon passeport, je devais faire 47cm et seulement 46cm le soir.

Ont rejoignit nos chambres pour se faire resserrer nos lacets, Ninon m'attendait dans la petite chambre, avec son mètre ruban.

Ensuite, ont descendit au rez-de-chaussée pour le déjeuné. La descente des deux étages avec nos hauts talons était également un exercice, Gwendoline se plaignit d'avoir mal au pied et qu'elle ne pourrait pas supporter ces talons hauts toute la journée.

- Rassure-toi. Lui dis-je. Nous avons cours d'histoire cet après midi.

Il fallut ensuite, remonter ces deux étages. La montée avec les hauts talons, était plus facile pour l'équilibre, mais le souffle nous manquait avec nos corsets plus serrés que ce matin.

Trois jours plus tard, nous avons eu le deuxième cours de maintien.

Durant, la première heure de cours, Caroline nous fit simplement marcher. Durant cet exercice, elle s'adressa à chacune d'entre nous, pour nous faire des remarques et nous donner des conseils. Nous étions loin de la démarche gracieuse, que nous devrons toutes avoir dans quelque mois.

Solange maîtrisait bien sa marche perchée sur ces hauts talons, bien que cela lui demandait un effort de concentration permanente, pour ne pas trébucher. Gwendoline était étonnante, bien que très concentrée sur sa marche, elle se débrouillait très bien et avait réussi à se tenir bien droite. Il m'avait fallut bien plus longtemps pour atteindre son niveau. C'était étonnant elle ne portait des hauts talons que depuis quelques jours. Par contre, Estelle avait beaucoup de difficulté, elle n'arrivait toujours pas à se tenir les jambes bien droites. Pour Evelyne et Isabelle, ce n'était pas encore parfait, bien au contraire, leurs équilibres me semblaient des plus instable. Leurs pieds cambrés tremblaient sur le sommet de leurs talons.

Caroline nous fit marcher en ligne droite, et nous obliger à faire des allers et retours dans la salle. Le but était de nous apprendre à faire un demi-tour gracieux, et bien sur, de ne pas trébucher durant ce demi-tour, perchées sur nos hauts talons

- N'hésitez pas de vous déplacer durant la journée, plus vous marcherez avec vos hauts talons, et plus vous serrez à l'aise. Penser à garder vos genoux bien serrés l'un contre l'autre.

Et ont marchaient, lentement, la plupart d'entre nous avec précaution pour ne pas tomber, ou se fouler la cheville. Mes mollets commençaient à me faire mal, à force de marcher avec les pieds tellement cambrés.

- Mesdemoiselles! Vous pouvez vous reposer quelque instant. Je vais en profiter pour vous expliquer le prochain exercice. Cet exercice est très important pour la suite. Dans quelques instants, Véronique va venir vous équiper de vos bracelets. Ces bracelets sont de véritables bijoux que j'espère vous serez fières de porter. Ils sont marqués à votre nom, et décoré suivant les indications de votre famille. Ils vous aideront à acquérir une démarche particulièrement élégante. C'est une marche qui a été mise au point par des chorégraphes de danse classique. Mademoiselle Véronique, va vous en faire une démonstration.

Mademoiselle Véronique se plaça face à nous et releva le bas de sa robe. Elle portait des chaussures incroyables, lui faisant des pieds minuscules, et presque verticaux tellement les talons étaient hauts.

- Je vous explique la marche que vous devrez faire: Pied droit: Le faire glisser en avant, et ensuite suivant un mouvement circulaire, le poser à gauche de votre pied gauche, en croisant les jambes. Deuxième mouvement: Pied gauche: Le faire glisser dans un mouvement circulaire pour le faire passer juste devant le pied droit et ensuite, en croisant vos jambes, poser votre pied gauche à droite de votre pied droit. A chaque pas, vous devez croiser vos jambes, Les pas que vous ferez, seront croisés et très petits. Vous ne devez avancer que de dix cm au grand maximum à chaque pas.

Et Véronique fit cette démarche bizarre, en croisant les jambes à chaque pas, avançant extrêmement lentement, et en ondulant de gauche à droite pour rattraper son équilibre perdu, par le croisement des pieds, à chaque pas. Sa démarche était fascinante, elle donnait une impression de déséquilibre permanent, et tous cela en gardant les genoux parfaitement collés l'un contre l'autre. En fait, sa robe était tellement étroite, qu'elle était obligée de garder ces genoux étroitement serrés l'un contre l'autre.

- Debout! Mesdemoiselles! Face au miroir sur deux rangs. Nous allons exécuter cette marche. Regardez Mademoiselle Véronique!

- soulevez légèrement le pied gauche! Attention! Gardez votre équilibre

- Mouvement tournant, pied gauche devant

- Croiser la jambe

- Poser le pied gauche! Et rectifiez votre équilibre

-Attention, deuxième pas!

- soulevez légèrement le pied droit! Attention! Gardez votre équilibre

- Mouvement tournant, pied droit devant

- Croiser la jambe

- Poser le pied droit! Et rectifiez votre équilibre

- troisième pas...

Cela ressemblait aux grandes manoeuvres de l'armée, comme j'avais pu le voir un 14 juillet à Mande. Un Deux un deux un deux...

Les premiers pas furent chaotiques. Il fallut traverser plusieurs fois la grande salle pour que cela soit un peu plus souple. Véronique marchait en cadence, avec une légèreté étonnante, elle semblait danser en marchant. Il nous faudra encore beaucoup d'exercices pour atteindre sa maîtrise.

En effet, la matinée ne fut pas suffisante pour maîtriser cette manière de marcher. Je m'en sortais bien, grâce aux exercices que m'avait fait faire Caroline avant mon entrée dans l'école. Gwendoline était particulièrement douée, en peu de temps, elle réussit à passer de la marche précaire, déséquilibrée et chaotique, à une marche plus calme, plus fluide.

Caroline nous annonça

- Mesdemoiselles! Au vus des difficultés de certaine d'entre vous, la pose de vos bracelets de genoux est reportée à demain.

Quelque une exprimèrent leur soulagement.

- Je vous recommande de vous entraîner dès maintenant, à cette nouvelle marche. Dans peu de temps, vous devrez marcher sans écarter vos genoux, et vous porterez des talons plus hauts et plus fins. Bonne fin de journée. Demain matin Mademoiselle Véronique s'occupera de vous toutes.

 

 

 

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